2021,  5*,  Edité,  Numérique,  Roman

La grande muraille, par Claude Michelet

Ce n’est qu’un champ de pierres, que l’oncle Malpeyre lègue à son neveu Firmin, pour lui  » apprendre à vivre « . Personne n’a jamais pu cultiver ce coin de causse du Quercy, où quelques chênes rabougris et des genévriers végètent entre les cailloux et les grandes dalles de calcaire blanc. Le jeune homme décide de relever le défi qui lui est lancé : sous les pierres, il y a forcément de la terre, et Firmin commence à dépierrer….

Ce travail insensé occupera toute sa vie. Car, après avoir fait resurgir la terre et planté de la vigne et des arbres fruitiers, Firmin, revenu de la guerre, entreprendra d’utiliser les pierres de son champ à la construction d’une grande muraille qui ceindra son domaine. Non plus pour l’utilité, mais pour la beauté de la chose. C’est la plus simple histoire du monde. Contée avec des mots qui portent l’odeur du causse en été, c’est aussi l’une des plus belles

 


C’est marrant la mémoire quand même… je vous explique.
Il y a une bonne semaine, allez savoir pourquoi, je me suis mis à repenser à un livre que j’ai lu il y a au moins vingt-cinq ans, mais impossible de me souvenir du titre. Alors je pose la question sur un groupe dont je fais partie sur Facebook.
« Je suis à la recherche d’un livre que j’ai lu il y a quelques années et que j’ai beaucoup aimé. Il s’agit de l’histoire d’un type qui refuse de partir à la guerre de 14 et qui reste dans son village. Il passe tout le temps de la guerre à construire un mur dans son champ. Tout le monde vient le voir et se moque de lui. »
Et dans ma tête, je pensais : un livre sur la folie et le refus d’obtempérer, l’insoumission.
Très rapidement, j’ai la réponse : « La grande muraille » de Claude Michelet.
Voilà, oui, c’est ça !
Ni une ni deux, j’achète le bouquin. Oh, un petit livre. Moi qui étais partie pour un pavé… quatre-vingt-une pages ! Oui 81, vous avez bien lu ! Autant dire une grosse nouvelle !
Et ce matin, vu le sale temps qui m’empêchait de sortir, je me suis lancé dans la lecture de « La grande muraille ».
Rien à voir, ou presque, avec mon souvenir.
En fait, la décision de construire le mur n’est prise qu’à deux ou trois pages de la fin du livre.
Le héros, Firmin, hérite d’un champ rempli de pierres, impossible à cultiver. Il décide d’en faire ce qu’il a envie. Et pour se prouver à lui-même qu’il en est capable, il se lance dans le nettoyage de ce champ. Autant nettoyer les écuries d’Augias, un travail aussi long qu’inutile et vain.
Firmin, part bien à la guerre, et la vit intégralement sur le front où il est remarquable et presque héroïque.
Aucune insoumission, aucune désobéissance, au contraire, il fait ce qu’on lui demande, tout en se disant qu’il conserve son libre arbitre.
Mais ce livre, au lieu d’être une ode à l’insoumission, est en fait une ode à la liberté.
Tout le village autour de lui le prend pour un fou. Nettoyer un tel champ, il faut être complètement dingue, ne rien avoir dans la tête.
Mais lui se sent libre, libre de faire ce qu’il veut, même si ça fait chier tout le monde, même si c’est pour aller dans le sens inverse du bon sens.
Il sait parfaitement que ce qu’il fait est inutile et voué à l’échec, mais il veut absolument continuer. Par respect pour lui-même.
Un petit extrait pour finir, et peut-être vous donner envie…
« Il ne voulait pas sortir de là, il ne voulait surtout pas reconnaître que ce qu’il entreprenait était inutile. Il sentait, sans pouvoir encore l’expliquer, que l’œuvre qu’il voulait faire lui était désormais presque aussi indispensable que l’air, le pain ou le vin. Certes, il se savait toujours libre de poursuivre ou d’abandonner, mais il était certain que dans ce dernier cas, sa vie tout entière serait marquée par cet abandon.
— De toute façon, reprit-il, ce qui compte c’est de faire quelque chose, n’importe quoi, mais quelque chose. »

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